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Rétention, droit de
1 PRÉSENTATION

rétention, droit de, droit de retenir une chose appartenant à un débiteur qui n’a pas payé sa dette.

Il existe une très grande diversité de types de garanties que peuvent exiger les créanciers de leurs débiteurs. Celles-ci sont aujourd’hui si nombreuses qu’un créancier, même muni de sûretés, n’est plus certain de recouvrer le montant de sa créance s’il se trouve en concurrence avec d’autres créanciers, eux aussi munis de sûretés, dont certaines primeront la sienne — les créanciers institutionnels jouissant, à cet égard, de privilèges et de super-privilèges. Devant cet état de fait, les créanciers imaginent chaque jour de nouveaux mécanismes pour s’assurer du remboursement de leur créance. De cet état de fait résulte qu’aujourd’hui le droit des sûretés n’a plus de cohérence d’ensemble, car il est soumis aux effets conjugués des créations hasardeuses de la pratique et des constructions jurisprudentielles qui tentent de les justifier.

Dès lors, les créanciers en reviennent aux méthodes les plus sûres pour garantir soit le paiement de la dette, soit la récupération du bien fourni aux débiteurs. Deux méthodes assez frustes coexistent :

- ne transmettre la propriété du bien que lorsqu’il sera intégralement payé ; cette méthode a recours à des procédés comme le crédit-bail ou la clause de réserve de propriété ;

- conserver le bien tant que la créance n’est pas totalement honorée ; cette méthode consiste en l’utilisation d’un droit de rétention. Celui-ci existe soit parce qu’il est rattaché à une sûreté réelle comme le gage ou le nantissement, soit indépendamment de toute sûreté.

Le droit de rétention, qui existe déjà en droit romain, se caractérise par sa redoutable efficacité, puisqu’il offre la faculté au créancier qui détient la chose de son débiteur d’en refuser la restitution jusqu’à complet paiement de sa créance. Il est tellement efficace qu’on le qualifie parfois de « voie de fait privée », de « prise en otage d’un bien », voire de « droit sauvage du tout ou rien ».

Le droit de rétention doit son efficacité à ce que, à l’inverse des autres sûretés, il ne donne pas de droit préférentiel sur un bien, mais procure un moyen de pression sur le débiteur, sans concurrence avec les autres créanciers. C’est pourquoi la jurisprudence la plus récente considère que le droit de rétention n’est même pas une sûreté. Pour autant, ni la loi ni la jurisprudence ne précisent la nature juridique du droit de rétention à l’égard de laquelle règne une grande incertitude.

On peut remarquer que le droit de rétention s’appuie sur un sentiment d’équité et même sur une réaction psychologique naturelle : le refus de restitution de la chose au débiteur est instinctif, dès lors que celui-ci n’a pas rempli sa mission. Aussi, il s’agit quasiment d’un procédé de justice privée qui pourrait s’apparenter à l’exception d’inexécution contractuelle, encore que le droit de rétention fonctionne non seulement en matière contractuelle, mais aussi en matière extra-contractuelle.

La très grande efficacité du droit de rétention oblige à soumettre sa mise en œuvre à un certain nombre de conditions, afin qu’il puisse produire tous ses effets.

2 LES CONDITIONS DU DROIT DE RÉTENTION

Les conditions de mise en œuvre du droit de rétention sont assez simples : il faut une créance, la détention d’un bien, et un lien de connexité entre la créance et la détention.

2.1 La créance

La créance doit être certaine, liquide et exigible ; elle n’est pas obligatoirement une créance d’argent, elle peut être aussi une créance de faire ou de ne pas faire.

2.2 La détention

La détention du bien étant une condition d’existence du droit de rétention, il ne peut s’agir que d’un bien corporel et non d’un bien incorporel, sauf si celui-ci est constaté dans un titre au porteur. Pourtant, certains textes spécifiques ont créé des droits de rétention fondés sur une possession fictive, c’est-à-dire des droits de rétention sur une chose que le créancier ne détient pas. C’est le cas du décret du 30 septembre 1953, qui permet notamment aux vendeurs de véhicules automobiles achetés à crédit de bénéficier d’un droit de rétention fictif sur le véhicule tant que celui-ci n’est pas intégralement payé.

Enfin, la détention doit être régulière, c’est-à-dire que le créancier doit détenir le bien de bonne foi. Une détention née d’un acte illicite, d’une fraude, voire d’une faute, ne peut donc permettre l’exercice d’un droit de rétention, même si elle apparaît légitime.

2.3 Le lien de connexité entre la créance et la détention

En droit positif, le lien de connexité entre la créance et la détention peut être de trois ordres. Il peut s’agir d’un lien de connexité matérielle, c’est-à-dire que la créance est née à l’occasion de la détention de la chose. Cela implique que si le rétenteur se dessaisit du bien, il perd son droit de rétention. Par exemple, le garagiste qui répare un véhicule peut le conserver tant que le débiteur n’a pas payé la réparation. En revanche, s’il rend le véhicule au débiteur sans que la réparation ait été réglée, et que le débiteur lui rapporte par la suite le même véhicule pour une autre réparation, le garagiste ne pourra conserver le véhicule pour se faire payer la première réparation, car entre-temps il aura perdu la connexité matérielle avec le bien.

Dans la connexité juridique, la créance et la détention sont nées d’un même rapport juridique, contrat ou quasi-contrat (par exemple, le cas du comptable qui établit les comptes d’un client en vertu d’un contrat qui les unit). Si le client refuse ensuite de rémunérer son travail, le comptable peut conserver les documents comptables jusqu’à complet paiement de sa prestation.

Troisième type de connexité reconnue en droit positif : celle qui est à la fois matérielle et juridique. C’est en réalité la plus fréquente car la plupart du temps un contrat est passé en même temps que la chose est remise.

La connexité conventionnelle correspond à l’idée qu’il devrait être possible à une personne de remettre la détention d’un bien à une autre personne, sans qu’il y ait d’autre lien entre la créance et la détention que la volonté des parties de les lier. Mais ce type de connexité n’a toujours pas été consacré en droit positif, et l’utilité d’une connexité conventionnelle n’est pas avérée.

3 LES EFFETS DU DROIT DE RÉTENTION

Le droit de rétention a pour principal effet de permettre au créancier de conserver le bien tant que la créance n’est pas payée. Cette faculté est d’autant plus nuisible que ce bien retenu est la plupart du temps d’une valeur très supérieure au montant de la créance. Ce principe ne rencontre que peu de limites.

3.1 Le principe du refus de restitution

Le refus de restitution peut, en premier lieu, être opposé au débiteur, et ce tant que le paiement de la créance n’est pas intégral, en vertu du principe de l’indivisibilité du droit de rétention.

S’il est vrai que le droit de rétention ne procure au créancier ni droit de suite, ni droit de préférence, il n’en reste pas moins que le droit de rétention a aussi des effets à l’égard des tiers, car le droit du créancier rétenteur est valable erga omnes. Ainsi la rétention du bien est opposable à tous les autres créanciers du débiteur. Quant à un conflit entre deux créanciers rétenteurs, il ne devrait pas pouvoir survenir, car en principe seul l’un d’entre eux sera détenteur de ce bien. Mais il se peut qu’un créancier rétenteur possédant la chose soit confronté à un créancier muni d’un droit de rétention fictif. Dans ce cas particulier, la jurisprudence décide traditionnellement que le détenteur réel l’emporte sur le détenteur fictif.

Le refus de restitution est aussi opposable aux ayants cause du débiteur. C’est une solution de bon sens, car l’inverse ruinerait l’efficacité du droit de rétention en permettant par exemple au créancier d’aliéner son bien pour que son ayant cause à titre particulier puisse le récupérer.

De façon encore plus significative, le droit de rétention est opposable au véritable propriétaire du bien, même si celui-ci n’est pas le débiteur, à condition que le lien de connexité entre la créance et la détention soit matériel, car la dette est alors attachée à la chose et non au débiteur.

3.2 Les limites du refus de restitution

Il n’y a que très peu de cas dans lesquels le créancier rétenteur est contraint de remettre le bien en cause, même s’il n’a pas été désintéressé. Ce sont les cas dans lesquels la paralysie du bien cause un préjudice trop grave pour qu’on le laisse entre les mains du créancier, c’est-à-dire quand le seul intérêt du créancier ne permet pas de l’emporter sur ceux des nombreuses autres personnes concernées.

Tel est le cas si le débiteur est soumis à une procédure de liquidation judiciaire, car la loi du 25 janvier 1985 (article 159, alinéa 4) prévoit que le liquidateur peut récupérer le bien sur lequel porte la créance et le vendre. Dans cette circonstance, le droit de rétention du créancier se reporte sur le prix de cession.

Une autre limite au pouvoir du créancier rétenteur de refuser la restitution du bien peut être posée par un juge d’instruction ou par un juge de la mise en état pour les besoins d’une procédure pénale. Le rétenteur doit alors remettre le bien même sans être désintéressé, en espérant que le bien lui reviendra au terme de la procédure.

On voit bien que, hormis ces deux hypothèses, finalement assez marginales, le droit de rétention est bien l’un des moyens les plus sûrs d’obtenir le paiement d’une créance.


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